Laurina Paperina

Exposition à la Galerie Magda Danysz du 16 fevrier au 29 mars 2008

L'art relève parfois de l'exorcisme. Poussé par un sentiment de satiété virant à la nausée, il devient alors pour l'esprit un puissant vomitif. S'emparant des images qui nous colonisent, Laurina Paperina en détourne la puissance pour en faire jaillir la bêtise.

Pour être efficace, l'art doit être primitif. Ne pas se perdre dans des questions de formes quand l'urgence de la situation l'exige. Voilà peut-être pourquoi les peintures de Laurina Paperina sont si naïves. Leur ambition n'est pas d'être esthétique. Car dès qu'elles ne suscitent plus le rire, elles passent à côté de leur mission : être pour notre génération un curatif.

Or, qu'y a-t-il de plus morbide que l'amour que nous portons à nos idoles ? Notre incapacité à sentir que cet amour nous assassine. Que ce soit pour les catholiques avec Ratzinger, ou bien pour les artistes avec Andy Warhol, le résultat est toujours le même : chaque sous-culture nous pousse à suivre ces meneurs et à renoncer progressivement à faire usage de notre sens critique. Alors sachons pour une fois faire preuve de scepticisme et posons avec Laurina à nos idoles quelques questions.

Où est le christianisme pour celui qui se contente d'admirer les contingences de son institution ? Où est l'art pour celui qui pense avec Warhol que ce sont les médias qui font l'artiste ? Dans les deux cas, au même endroit : dans la docilité et la soumission; dans la confortable illusion de croire que d'autres peuvent agir et penser à notre place.

Alors gloire à Laurina Paperina qui exige de nous que nous ne l'admirions pas. Que nous ne soyons pas ses disciples mais comme elle de libres penseurs. Dans chacune de ses oeuvres se répète le même leitmotiv, la même ironie méchante qui poussait déjà Nietzsche à écrire ces lignes : « Il y a dans le monde plus d'idoles que de réalités: c'est ce que m'apprend le « mauvais oeil » que je jette sur le monde et aussi la « méchante oreille » que je lui prête... Là aussi questionner à coups de marteau, et, qui sait, percevoir pour toute réponse ce fameux « son creux » qui indique des entrailles pleines de vent - (...) » (F. Nietzsche, Le crépuscule des idoles, Avant-Propos)

Andy Wharol - Laurina Paperina

Mais n'oublions pas non plus que la tâche la plus haute de l'art n'est pas d'être ironique. L'ironie n'est pour l'artiste, au mieux, «qu'un délassement, qu'une tâche solaire au milieu d'un loisir studieux. » (idem). Ainsi, par-delà le rire se dresse la tâche authentique et paradoxale de l'art : faire de la finitude de l'homme le point de départ d'une incarnation dialectique de l'infini dans le fini.

Frédéric-Charles Baitinger

Artiste

Laurina Paperina est née à Rovereto en Italie, en 1980. Elle vit et travaille à Mori, en Italie.

www.laurinapaperina.com