Julien Spianti

Exposition à la Galerie Pierre Marie Vitoux du 17 décembre 2008 au 18 janvier 2009

Figures à peine suggérées, espaces fantomatiques ou déconstruits, sur chaque dessin de Julien Spianti plane un sentiment d'angoisse et d'inachèvement. Des incises temporelles perturbent l'unité des scènes : les planchers germinent ou se liquéfient, les murs s'effacent ou s'ouvrent sur des portes. Avec une maîtrise et une sûreté impressionnante, ces dessins nous projettent au cœur d'un monde libidinal et pulsionnel où les fantasmes et les chimères ne sont plus des leurres, mais les éléments constitutifs d'un monde en perpétuelle métamorphose.

Acta est Fabula

Il pleut dans la chambre. Une barque vogue sur un plancher. Des lattes s'écoulent comme un ruisseau. Si nous jugeons d'une peinture par l'effet qu'elle produit sur notre imagination, nous ne pouvons que saluer l'étrange imbroglio de ces compositions dont la force plastique fissure l'instant unique de la peinture en y superposant de multiples événements. Et si, en un seul espace, coexistaient une succession de corps portant comme des stigmates les traces de leurs changements ?

Prenant à contre pied la formule de Lessing – l'artiste ne peut jamais saisir qu'un seul instant de la nature toujours changeante - les œuvres de Julien Spianti, bien que physiquement soumises à cet impératif, ne cessent pourtant de le subvertir et d'entraîner notre imagination dans un dédale de songes et d'actions concomitantes. Reprenant à son compte les acquis des peintres cubistes et les leçons physico-surréalistes du Poisson Soluble, les scènes qui nous sont présentées intègrent plusieurs temps et plusieurs lieux selon différents points de vue.

Il pleut dans la chambre - Julien SpiantiLe Jardinier - Julien Spianti

Mais cette audacieuse déconstruction du temps et de l'espace n'a pas pour objectif de rompre avec la figuration. Bien au contraire. Chaque déplacement y sert une composition d'ensemble qui fonctionne comme une invitation au délire et à la divination : dis-moi ce que tu vois, et je te dirai qui tu es. L'œil du spectateur n'est plus ici le récepteur passif d'une œuvre sans référence, mais le point de catalyse où le silence de la toile se transforme en désir de fabulation.

Fabula rasa. Ni symboliques, ni narratives - au sens ou d'ordinaire ce mot s'entend, les œuvres de ce jeune artiste étendent les limites de la figuration. Les corps qui les hantent n'y sont plus les points d'appui d'une histoire déjà connue, mais des nébuleuses vrillant l'équilibre interne des scènes tout en y insufflant la vie – c'est-à-dire le temps; même si le temps ici se mesure en terme d'échauffement d'espace.

Voilà peut-être pourquoi les histoires que ces dessins nous content ne se laissent pas facilement prendre dans les filets du langage. Ne connaissant ni avant, ni après, mais un éternel présent mouvant, les actions qui s'y déroulent ne sont que virtuelles, et les verbes qui pourraient servir à les décrire, sans sujet.

Frédéric-Charles Baitinger

Artiste

Julien Spianti est un artiste français qui vit et travaille à Paris et à Bruxelles

julienspianti.com
Lieu d'exposition

Galerie Pierre Marie Vitoux

Julien spianti - Dessins

du 18 Décembre 2008 au 17 Janvier 2009

3 rue d'Ormesson, Place Sainte Catherine, Métro Saint Paul, ligne 1

www.galeriepierremarievitoux.com