Kosta Kulundzic

Exposition au Centre Culturel de Serbie du 17 juin au 26 juillet 2008

Descentes de croix, portraits de saints, variations sur l’histoire de Judith, Kosta Kulundzic se sert de la Bible pour dresser le portrait satirique de sa vie intime et de son époque : français, américains, serbes, croates, n’avons-nous pas tous un jour été dans la peau du bourreau posant devant l’idole comme devant un trophée de guerre ? Et si nous, occidentaux, étions devenus sans le savoir, les derniers épigones de l’empire romain ? Et le Christ, la part souffrante de notre amour ?

"Et ne m’apprends pas à prier. Pas la peine ! Il n’y a plus pour moi de retour au passé." (Essenine, Lettre à ma mère).

A l’instar de l’esthète qui aime à se perdre dans les bras d’Apollon, le croyant aime à regarder son idole nimbée de lumière. Mais tandis que l’esthète s’oublie dans cette contemplation ; le croyant, lui, sait qu’il blasphème s’il ne parvient pas à faire de l’œuvre qu’il contemple le point de départ de son oraison. Aux yeux de la foi, ce n’est jamais le tableau qui est jugé, mais celui qui le voit.

Face aux œuvres de Kosta Kulundzic, la tentation est grande de se perdre dans la beauté des formes, dans la précision des contours, dans le réalisme des figures. Et pourtant, tous ces attraits esthétiques ne sont qu’une stratégie de l’artiste pour nous amener à le suivre dans une quête plus spirituelle.

Derrière chacune de ses toiles, Kulundzic s'approprie librement des sujets bibliques : descentes de croix, portraits de saints, variations sur l’histoire de Judith ; tous les grands thèmes de l’Ancien et du Nouveau Testament y sont revisités et comme revitalisés : loin de n’être que des traces désenchantées d’une sacralité déchue, ils surgissent devant nous avec une pertinence et une actualité saisissante.

La question n’est plus : comment est représenté Judas, Pilate ou Judith, mais pourquoi Kulundzic s’amuse à nous glisser dans leurs peaux ; à nous représenter comme étant leurs doubles complices ? Sommes-nous donc tous coupable aux yeux de la bible ? Sommes-nous encore à l’image du juif errant crachant sur le messie ? Qui sait ? Et si tel est le cas, qui lavera nos pêchés - puisque le Christ, pour nous, n’a jamais triomphé de la mort ?

Ne nous y trompons pas : si Kulundzic aime à parler de la bible, c’est qu’il trouve dans ses histoires le moyen de dresser le portrait satirique de notre époque : français, américains, serbes, croates, n’avons-nous pas tous un jour été dans la peau du bourreau posant devant l’idole comme devant un trophée de guerre ? Et si nous, occidentaux, étions devenus sans le savoir, les derniers épigones de l’empire romain ? Et le Christ, la part souffrante de notre amour ?

Le Martyre de Saint Matthieu - Kosta Kulundzic

Kulundzic l’avoue d’ailleurs lui-même avec un brin d’ironie : « dans mes tableaux, ce sont les bourreaux que je magnifie. » Car les bourreaux sont toujours les héros du temps présent et les martyrs les boucs-émissaires de l’histoire.

« Pourquoi donc suis-je pour tous un repoussoir ? » écrivait le poète russe Essenine peu de temps avant sa mort. Lui, « ce vivant porteur d’une marque secrète » ; il fallait pourtant qu’il meure comme saint Matthieu ; que la foule le sacrifie en holocauste d’amour pour que s’apaise sa fureur. Mais seuls les vrais martyrs meurent ainsi – en pleurant par avance le crime dont se chargent les hommes qui les assassinent. « Que celui qui n’a jamais péché jette la première pierre ! »

Frédéric-Charles Baitinger

Artiste

Kosta Kulundzic est un artiste Serbe qui vit et travaille à Paris.

www.kulundzic.com
Lieu d'exposition

Centre Culturel de Serbie

La Croix

du 17 Juin 2008 au 26 Juillet 2008

123, rue Saint Martin - 75004 Paris - Métro Châtelet/Rambuteau

centrecultureldeserbie.blogspot.com